Cet ancien sujet manquait sur notre forum, je le reposte ici, copie de celui que j'avais posté sur 911Bretagne.net à l'époque. Ca fera plaisir à certains.
J’ai eu la chance inouïe d’être invité à participer au Mans Classic le WE dernier au volant d’une Porsche 906 de 1966. Je n’en ai pas parlé sur le forum avant, un peu par superstition, car les préparatifs ont été assez incertains, avec une auto prête la veille des vérifs techniques. 2 jours avant elle n’avait toujours pas son moteur et sa boite… En ce qui me concerne ce n’était pas beaucoup mieux, en termes de prépa avec comme conséquence de l’indisponibilité de l’auto, l’impossibilité de faire un roulage préalable avec la voiture, une méconnaissance du circuit des 24 h ( le « grand » circuit, comme ils disent au Mans) et un retard aux vérifs administratives qui m’a obligé à demander une dérogation pour les passer le vendredi matin avant 9 h 30…(lever à 5 h à Paris)
Bref, nous voilà engagé en plateau 5, avec du lourd, tant côté autos ( 917, 908, 910, Chevron, Lola T 70, Ford GT 40…) que pilotes (Yvan Muller, Soheil Ayari, Paul Belmondo, Fabien Giroix…et d’anciens vainqueurs des 24 h comme Richard Attwood, Vern Schuppan...)
Un peu intimidant tout çà d'autant plus que la météo annonce des averses..., pleins d'humilité nous nous donnons 3 objectifs :
1. Garder l'auto sur la piste (on verra que malheureusement il n’a pas été atteint jusqu'au bout suite à un contact lors de la dernière course du dimanche matin)
2. Ne pas gêner les pilotes plus rapides
3. Se faire plaisir....
Plus facile à dire qu’à faire alors que ma première prise de contact avec la voiture et le circuit (et seule séance d’essai) va se résumer en 1 tour dans la nuit de vendredi à samedi. Comme nous nous partageons le volant à 4, et que les séances ne font que 35 mn c'est un peu compliqué pour tous rouler, mais on fait péter un 5'23'' qui nous place en milieu de grille pour la 1ère course...pas si mal après tout..
Nous décidons de nous partager le volant 2 par 2, je prendrai le 2ème relais de la 1ère course du samedi en fin d'après midi, 2 autres feront la manche de nuit, puis je reprendrai le 2ème relais de la dernière course du dimanche matin.;enfin en théorie. Prudemment je laisse les départs lancés, qui sont toujours un peu chauds, à mon coéquipier plus expérimenté, puis je prends le volant dans les stands après 20-25 mn de course jusqu'à la fin.
Les 2 premières courses (une de jour, une de nuit à 2h du mat) se passent pas mal, nous remontons dans le 1er tiers de la grille...Chanceux nous évitons la pluie, lors de ma course de grosses gouttes s'écrasent sur le pare brise au virage Ford juste avant l'arrivée, ouf ! Mais le retour au paddock sous des trombes d'eau au milieu des spectateurs et du traffic à l'intérieur du circuit sera un enfer, avec une voiture qui s'embue totalement et une interdiction de mettre l'essuie glace pour cause de parebrise en plexi qui se rayerait irrémédiablement au bout de 10 allers retours du balai..Quasiment sans aucune visibilité j'avais tellement peur d'emboutir une autre voiture ou de faucher un piéton..
Malheureusement l'aventure s'arrêtera lors de la 3ème et dernière course le dimanche matin, juste après le départ au Tertre rouge, Benjamin mon coéquipier part au contact avec la 917 n°23 (avec la belle peinture psychédélique d'époque) qui remontait comme un obus du fond de la ligne après s'être pris une valise de pénalité...des stands on entend que les 2 voitures sont dans le bac, je ne reprendrai pas le ..
Après la course les 2 voitures sont ramenées sur plateau, la 917 a une jante en magnésium explosée, qui a labouré tout le côté droit de notre 906...Les réservoirs étant installés dans les pontons latéraux, heureusement que les règlements exigent des reservoirs poches doublés de kevlar qui ont bien résisté, je n'ose pas imaginer ce que le même accrochage aurait donné à l'époque avec des réservoirs en alu ou en fibre qui se percent et laissent échapper 60 l d'essence sous la voiture avec les échappement bien chauds...
Un peu de travail sur l'auto, il faudra la passer au marbre car un tube du chassis tubulaire a ramassé (le contact a du avoir lieu à 160 - 180 km/h...), mais le marbre était prévu de toutes façons car lors de sa préparation il s'est avéré qu'elle n'était pas complètement "droite", peut-être une séquelle de sa carrière en compétition entre 1966 et 1970...
Sinon c'est une auto super facile, une fois accoutumé à la position de conduite, quasiment couché, et à sa boite à la grille inversée et aux verrouillages, disons..virils. Le grand plaisir de piloter une auto de compétition accessible sans être forcément pilote chevronné , des freins d'enfer, poids très contenu ( 580 kg sur la fiche d'homologation mais la notre était plus lourde), pratiquement pas de changement d'assiette et le côté ultra sain, efficace et maniable du moteur central tel que je le connais sur mon croco, mais la comparaison s'arrête là, c'est tellement différent !Un bon petit (2 l) 6 cylindres à carbus bien vif qui prend des tours (rupteur à 8 400 que j'ai déclenché plusieurs fois) super bien réglé et très musical ( mais bouchons d'oreilles obligatoires sous peine de devenir sourd après 5 mn..)Voilà, j'ai essayé de décrire l'indescriptible, il faut vivre çà de l'intérieur pour comprendre, quand vous êtes aux première loges au bout des Hunaudières à Mulsanne, juste derrière une Chevron ou Lola T 70 , de nuit avec les échappements qui lâchent leurs flammes...Magique.