Il parait que rouler en électrique, c’est le bien, et c’est Greta qui l’a dit alors… Mais Porsche le dit aussi, d’ailleurs lorsque j’ai déposé mon Cayman S chéri pour un petit problème de vibrations dans le tableau de bord, c’est un Taycan qu’ils m’ont prêté, pour 4 jours, rien de moins.
C’est qu’il en faut du temps pour isoler ces petits bruits qui vous gâchent le flat4, et peut être qu’il en faut au moins autant pour se faire à une Porsche qui démarre avec autant de bruit qu’une ampoule électrique ?
Première prise en main, c’est très beau, très grand, trop sans doute, cela reste très Porsche surtout au volant avec des ailes bombées sur le capot et de belles ailes larges dans le rétro. Le combiné d’instruments propose un excellent compromis entre la modernité du tout numérique et nos immuables 3 ou 5 cercles magiques. Quel plaisir d’échapper aux atroces tablettes posées à l’arrache sur le tableau de bord façon I4, Tesla ou Mercedes.
Pour le reste, c’est de la Porsche moderne en tout tactile, pas sûr que l’on y gagne quoi que ce soit face à la perfection des intérieurs 991/718, mais c’est hyper fonctionnel avec le degré de finition et d’ergonomie habituelles.
Démarrons donc la bête. Ah ben non, c’est déjà fait, il suffisait de rentrer dedans, il ne reste qu’à passer le mode Drive avec le minuscule bitogneau remplaçant le levier de vitesse. Premier petit pincement de cœur. Accélération tout en douceur, parfaitement dosée, décélération sans le si désagréable frein de récupération que l’on retrouve sur d’autres électriques, rapide sortie de la ville dans un silence de cathédrale et c’est parti pour 2 heures sur la 2 voies et 30mn de petites routes « sportives », direction la Bretagne profonde.
A ce stade, il convient de préciser que je ne prétends pas à l’objectivité puisque je n’aime pas trop l’idée de la voiture électrique et encore moins que l’on veuille nous l’imposer. Et même le Taycan et toutes ses qualités ne vont pas me faire changer d’avis. Il n’en manque pourtant pas avec un châssis et une direction tout à fait dignes de Porsche qui feraient presque oublier le poids de l’engin. Sans parler d’agilité, on est assuré d’un bel équilibre et d’une précision qui ne s'estompent que lorsque la physique rappelle aux pneus (même pas des modèles sport) que les miracles n’existent pas, et il faut déjà rouler vraiment fort pour cela.
En vrac, le son Bose est nul en FM, mais excellent avec des sources numériques y compris online ; l’intérieur noir est vraiment trop noir, mêmes les poignées ne sont plus en alu, sauf à choisir l’option peinture couleur carrosserie ; le GPS est sympa, mais ne vaut pas celui de Mercedes (qui utilise la vue live de la caméra avant et y incruste des indications 3D, en plus de la carte) ; le cruise control est plus dynamique que les chez les autres marques germaniques. Les avis sont très partagés chez mes amis sur le niveau de finition et l’esthétique que beaucoup trouvent en retrait à ma grande surprise, je trouve les deux au top, mais c’est très subjectif.
Reste les sensations. Cette voiture manque d’âme, d’abord et avant tout parce qu’elle ne fait aucun bruit. C’est déjà dur d’oublier nos flat et autres 6L, mais après ces 4 jours à bord, il me semble indispensable d’embarquer un son même artificiel, ne serait-ce que pour souligner les accélérations. Porsche a d’ailleurs pondu un « electric sound », une option à 500€ qui manque un peu d’audace, mais met un peu de sel dans la soupe. Car bien trop linéaire, la poussée fait mentir les chiffres, elle vous colle au siège, mais ne procure pas vraiment de plaisir. On sait bien qu’il suffit d’activer le PSE pour gagner 100 chevaux dans sa tête, le principe s’applique dramatiquement à l’électrique, à l'envers !
Autre domaine du plaisir, du moins pour ceux qui ont connu la vie sans internet, GPS ou mobiles, les compte-tours à aiguilles font donc les frais du «progrès ». Soit, les aspects pratiques sont indéniables pour les gros rouleurs, mais pourquoi donc Porsche a-t-il été si frileux dans le design de ces tristes cercles blancs sans aucun ADN de Weissach ? Une marque si friande d’options ne pouvait-elle pas nous en pondre une avec des graphismes plus typés, plus sportifs, plus ludiques même ? Les compteurs du Taycan, certes largement modulables, sont si ennuyeux, si peu dispensateurs d’émotions, que j’ai fini par les virer au profit de la carte étendue. Et c’est triste.
Evidemment, le Taycan est censé être une grande routière, ses prétentions sportives sont limitées et ses vrais clients doivent sans doute apprécier ce silence et ce compromis confort/sport assez exceptionnels. Sauf que la dite routière a une autonomie de 400Km grand max, et quand on habite au bout de la terre, littéralement, ça n’est pas triste. Entre Tregor, Cornouille et Vannetais, les stations de recharge rapides se comptent avec une main. Deux Total de 175Kw à Guingamp et Guidel et puis après, il faut lorgner sur quelques 50Kw. Tout le reste est en 11 ou 22Kw, stations Tesla incluses. Autrement dit, impossible de partir pour la journée à plus de 200Km, il faut dormir sur place le temps que ça se recharge, ou passer 5 ou 6 heures sur une aire de covoiturage à admirer le doux bruit des Clio diesel, du bonheur.
Et si on n’a pas de Wallbox à la maison, il faut 2 jours pour recharger l’engin. Ne parlons pas du manque d’info sur le net ou ailleurs. Quand j’ai appelé une station Total pour savoir si je pouvais y recharger le Taycan, ils m’ont dit qu’ils n’avaient pas été formés, mais qu’on ne pouvait pas payer en CB de toute façon. Ne pouvant à peine y croire, je me suis tapé les 50Km pour vérifier, eh bien si, on peut, mais pas à la caisse, directement sur la borne, ouf. Le plus simple étant de se créer un compte Charging chez Porsche, ou un Chargemap, etc. En résumé, on passe son temps à s’adapter aux contraintes de la recharge, et on en perd beaucoup…
Au final, grand merci au Porsche Center de Rennes qui m’a royalement prêté ce Taycan 4 jours le temps d’isoler cette vibration prise en garantie PA sans poser de questions, avec un super accueil en prime. Mais non merci pour cet engin, certes impressionnant techniquement, parfait pour remplacer une classe S diesel si on habite sur des grands axes avec des chargeurs 250Kw, mais sans plaisir. Le jour où je dépense 120K pour une Porsche, je prends une 991 GT3 d’occasion et je la prépare pour le circuit:D